Boukman n'était pas jamaïcain


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               (Li li an Kreyòl)       (English version
Auteur : Rodney Salnave
Fonction : Dougan (Scribe)
Date : 22 septembre 2016
(Mise à jour : 28 juillet 2019)

Les promoteurs de la farce musulmane présentent le nom Boukman tel un fait unique. Ce nom, fait sur mesure, aurait été alloué à Boukman par un colon de la Jamaïque qui l'aurait surpris en train de lire un coran (livre sacré des musulmans). Suite à cela, vu que Boukman était sensé avoir ce coran en permanence sur sa personne, les mots anglais "Book", signifiant "Livre" et "Man" pour "Homme", seraient combinés pour désigner ce soit-disant "Homme du Livre". 
Le pire dans cela est que même des gens instruits ont été convaincus de la véracité d'une pareille histoire qu'aucune preuve historique ne supportent. Car, personne ne peut citer l'habitation à la Jamaïque à laquelle Boukman aurait appartenu, ni le nom de ce colon anglais qui l'aurait surnommé "Book-Man". Malheureusement, quant il s'agit de sujet traitant de Noirs, les détails et les preuves historiques viennent soudainement négligeables. La vérité devient ce que l'on souhaite qu'elle soit.
Cet article-ci va retracer l'origine du mensonge disant que Boukman possédait un livre, et l'origine de celui avançant qu'il venait de la Jamaïque. Nous prouverons cela en 4 points. 

1- "Bouc" et "Bouque" sont des mots français :

Tout d'abord, le mot "bouc" appartient au lexique de la langue française. Il est la désignation commune du mâle de la chèvre* :


"Bouc. nm
1. (zoologie) mâle de la chèvre" (1)
Similairement, on nomme le mâle de la chèvre "bouk" dans le Créole haïtien. Par ailleurs, on trouve en Français, "bouque", qui est la troisième personne du singulier du verbe "bouquer" :

"Bouquer, un cheval qui bouque éprouve une fourbature instantanée qui l'empêche de marcher. C'est une extravasation de la synovie qui n'a pas de suite fâcheuse à Saint-Domingue. Le climat empêche l'endurcissement, et peu de jours suffisent pour rendre au cheval bouqué la lubréfication de ses membres." (2)
Le verbe "bouquer", utilisé couramment à Saint Domingue, passa même dans le Créole haïtien. Il y désigne le fait d'être épuisé, fatigué, aux sens propre et figuré. (3) Mais, nous insisterons ici d'avantage sur "bouque", le mot naval français et ses dérivés :
"BOUQUE (Mar.): Mot dont on faisait usage autrefois en Amérique, pour désigner un passage, un canal ou un détroit." (4) 

"HIST. XVe s. Et vindrent à passer devant une bonne ville qui sied à l'entrée de la bouque de la mer majeure, Bouciq. I, ch 32.
XVIe s. Le Tybre croist par les vents austraux qui, soufflans droict en sa bouque près Hostie, suspendent son cours, RAB. Sciomachie." (5)

Fort la Bouque

"Le fort la Bouque est sur la pointe est de la baie du fort Dauphin [Fort Liberté actuel], dont la beauté avait donné lieu au premier nom qu'elle reçut des Espagnols et qui devint celui de toute cette partie de l'île.
(…)
"Fort la Bouque, mot francisé de l'espagnol Boca, qui signifie entrée, bouche, et dont une prononciation vicieuse fait déjà le fort la Boucle
." (6)
Le 7 juillet 1768, soit 23 ans avant Bois Caïman, cette annonce issue de la prison de Saint-Marc, fait mention de 2 captifs (esclaves) habitant à "La Bouc", à Fort-Dauphin (l'actuel Fort-Liberté) :

"Le 7, deux Nègres Congo, l'un nommé Jacquet, étampé sur le sein droit, autant qu'on a pu le distinguer, MACA, âgé de 25 à 26 ans, taille de 5 pieds 4 pouces, ayant des marques incisives de son Pays sur le front et sur les deux tempes, l'autre nommé Martin, étampé sur le sein droit MOCA, et sur le gauche ALC, du même âge et de même taille, se disant appartenir à M. Chales, Habitant à la Bouc, Quartier du Fort-Dauphin." (7)
Débouquement
"On entend par le mot de Débouquement, un Passage étroit entre des terres, dans lequel il faut faire route pour sortir d'un Parage, ou quitter une Côte. Ce mot vient des Espagnols, qui ayant navigué les premiers dans ces cantons, nommèrent ces Passages et ces Entrées étroites Bocca, en français Bouches, dont les Marins ont fait le mot de Débouquement, pour dire sortir par une Bouche ou Passage étroit. On dit aussì embouquer pour entrer : mais ces termes ne sont en usage que parmi les Marins.(8)

"Vue du Débouquement de St.-Domingue", Moreau de St.-Méry, 1875.

Bouqueton
Le 29 juillet 1768, donc 23 ans avant Bois Caïman, cette annonce issue sortie de la prison du Fort-Dauphin parle de Pélagie, une captive (esclave) Ibo appartenant à Marguerite Bouqueton, une noire libre :
  
"Le 29, une Négresse Ibo, nommée Pelagie, étampée sur le sein droit LAF, se disant appartenir à la nommée Marguerite Bouqueton, n.l. demeurant à Ouanaminthe." (9)
Bref, nous voyons clairement que les mots "Bouc", "Bouque", "Débouquement" autant que "Bouqueton" font bien partie du lexique français employé dans la colonie de Saint Domingue. Cela dément l'avancé pathétique prétendant que le son "Bouque" en pouvait que provenir de l'Anglais "Book".


2- Voici la provenance du mensonge "Boukman jamaïcain" :

(1785)
En 1785 - seulement 6 ans avant Bois Caïman - de Bellecombe, alors Gouverneur-Général de Saint Domingue, a capitulé devant une bande de marrons s'étant réfugiés dans les montagnes avoisinant Jacmel (Sud de Saint Domingue). (10)

(1801)
Pierre François Page, un colon siégeant à titre de Commissaire colonial de Saint Domingue, a écrit sur ces 125 marrons dont la libération lui rappela un acte similaire des Anglais à la Jamaïque en 1733: 


"En 1733, l'Angleterre fut forcée de reconnaître l'indépendance de quelques Nègres révoltés à la Jamaïque ; et M. de Bellecombe, gouverneur à Saint-Domingue, fut obligé de faire, en 1785, une capitulation semblable avec 125 Nègres marrons." (11)
(1805)
1 an après l'indépendance d'Haïti, 14 ans après Bois Caïman, Phillipe Lattre, un abolitionniste, fit l'éloge de Boukman. Dans cet élan, il fut le premier à déformer "Boukman" en "Bouk -man". De même, il fut le premier à penser que ce nom était décomposable dans la langue anglaise. C'est pour cette raison qu'il déclara que Boukman était Anglais, et qu'il fit parti des 125 marrons libérés par de Bellecombe. Sans vergogne, l'auteur fit semblant que ces 125 marrons venaient de la Jamaïque et non pas localement des environs de Jacmel : 


"Le premier Spartacus de Saint-Domingue, était un nègre de nom anglais, nommé Bouk-man, qui n'a pas été connu appartenir à la colonie. Il était un envoyé des anglais, ou l'un des chefs des cent vingt-cinq nègres marons, que le gouverneur-général de Bellecombe avait reconnu indépendans." (12)
D'ailleurs, nul dans la colonie a jamais avancé que Boukman venait de la Jamaïque, ni même qu'il parlait anglais. Personne le connaissant, ni d'annonces de marronnage, ou même des textes officiels de la colonie, ne firent mention d'une telle origine. Rien ne laisse planer que Boukman venait d'ailleurs. Ce ne fut qu'après l'indépendance d'Haïti que Phillipe Lattre, bien à son aise en France, imagina une consonance anglaise au nom de Boukman. De toute évidence, il délirait.
Et afin d'estomper tout doute concernant la provenance de Boukman, nous devons souligner qu'il, contrairement à ce qu'affirma Phillipe Lattre, était bien connu dans la colonie. Car, en 1785, date de l'affranchissement des 125 marrons du Sud, selon les écrits du délégué municipal Leclerc, (13) Boukman était la propriété de sa famille, à l'Habitation Turpin du Limbé (Nord). De ce lieu, 4 ans plus tard, en 1789, il fut vendu à l'Habitation Clément de l'Accul du Nord :
"Des notes rédigées par Leclerc, qui fut procureur-syndic de la municipalité du Limbé juste au moment de l’insurrection, plus tard commissaire du gouvernement auprès du tribunal du Cap entre octobre 1792 et juin 1793, nous apprennent qu’il [Boukman] avait été esclave sur la plantation de sa famille, et qu’on le tenait pour un « mauvais sujet ». Il est devenu marron, un marronage de proximité ; il revenait la nuit sur la plantation pour se ravitailler. Il avait été surpris un soir par un frère du narrateur, blessé d’un coup de fusil et revendu. C’est ainsi qu’il avait abouti sur la plantation Clément à L’Acul, donc paroisse limitrophe du Limbé." (14)
(1808)
Henri Baptiste Grégoire (Abbé Grégoire), qui fut un auteur abolitionniste réputé, a repris le récit des 125 marrons à parti du texte de Pierre François Page paru en 1801-1802. Il parla des 125 marrons venant des alentours de Jacmel, et non de la Jamaïque :

"Les Nègres marrons de Jacmel ont, durant près d'un siècle, épouvanté Saint-Domingue. Le plus impérieux des gouverneurs, Bellecombe, fut obligé, en 1785, de capituler avec eux; ils n'étaient cependant que cent vingt-cinq hommes de la partie française, et cinq de partie espagnole." (15)

Cet extrait enlève tout doute quant à la provenance des 125 marrons en question qui furent bien issus de la partie française de l'île; tandis que 5 autres marrons venaient de la partie espagnole. Ainsi, même si nous plaçons Boukman au sein de ces 125 marrons indomptables, il proviendrait tout de même de la colonie de Saint Domingue. La Jamaïque n'était donc pas un facteur.

(1826)
L'auteur Placide Justin, sans offrir de source, reprit donc l'hypothèse de Phillipe Lattre, en présentant Boukman tel un "créole des îles anglaises" :


"Ce jour, à dix heures du soir, les noirs de l'habitation Turpin, sous la conduite du nègre Boukmann, créole des îles anglaises, entraînant avec eux les esclaves des habitations voisines, se répandent dans toute la dépendance du Cap..." (16)
Cette même année, Victor Hugo, jeune auteur, fit la réécriture de son premier roman qu'il consacra à la révolution dominguoise. Il s'est basé sur la falsification de Phillipe Lattre qui présenta Boukman comme un ancien marron jamaïcain que Bellecombe (Gouverneur de Saint Domingue, et non de la Jamaïque) aurait libéré. Mais Victor Hugo en rajouta. Écrivant un roman, et non un livre d'histoire, il usa de la liberté artistique dont il avait droit. C'est ainsi qu'il poussa plus loin l'audace de Phillipe Lattre en inventant que Boukman venait de la Montagne Bleue de la Jamaïque :

"Bouckmann, chef des cent vingt noirs de la Montagne Bleue à la Jamaïque, reconnus indépendants par le gouverneur-général de Belle-Combe..." (17)
(1831)
Théodore Gaspard Mollien, l'un des premiers à écrire l'histoire d'Haïti (non pas celle de Saint Domingue), s'est discrédité lorsqu'il a osé puiser dans le roman de Victor Hugo pour répéter la sottise que Boukman provenait des Montagnes Bleues de la Jamaïque :

"Jean-François, dernier domestique de M. Papillon, s'était placé au Dondon. Boukman, nègre des montagnes bleues de la Jamaïque, était à la soufrière de l'Acul." (18)
(1850)
Saint-Rémy, un historien haïtien, a attrapé au vol le mensonge concernant Boukman. Cependant, il ne l'a pas sû de Mollien dont l'ouvrage était inédit. Le roman de Victor Hugo, par essence non scientifique, lui a pourtant servit de source. Une indice se situe dans sa manière d'écrire "Bouckman" qui rappel le "Bouckmann" de Victor Hugo :

"Le chef principal avait nom Bouckman, africain primitivement vendu à la Jamaïque, d'où il fut porté à Saint-Domingue; il appartenait à l'habitation Clément. Cet homme, doué d'une force herculéenne, ne concevait pas ce que c'était que le danger; il marchait au combat avec l'enthousiasme d'un fanatique, semant la flamme de l'incendie et couvrant sa route de cadavres." (19)
(1925)
Finalement, en 1925, les jeux sont faits. C'est la débandade. Dorsainvil, associé des Frères de l'Instruction Chrétienne, ont répété la légende de Boukman jamaïcain sans effectuer les vérifications requises. Depuis lors, les écoliers haïtiens récitent cette leçon mensongère :

"Boukman était né à la Jamaïque; c'était un houngan, c'est-à-dire un prêtre du vaudou; il était de haute taille et fort comme un géant; il exerçait une influence extraordinaire sur les autres esclaves." (20)
Voici comment un fait historique tel que le Gouverneur Général de Bellecombe libérant 125 marrons téméraires aux environs de Jacmel (Sud de Saint Domingue, Haïti), fut converti en un mensonge jamaïcain qu'on récupéré les révisionnistes prônant l'islamisation de Boukman.  

Dans les deux extraits précédents, il faut aussi remarquer "doué d'une force herculéenne", ou "de haute taille et fort comme un géant" expressions racistes et non fondées qui sont continuellement attribuées à Boukman comme à nombre de révolutionnaires haïtiens (21-22) dont Cécile Fatiman (23), afin de suggérer la prédominance physique, et non l'intellect, comme élément justificateur du leadership chez le Noir (que l'on veut sauvage et intellectuellement démuni). Bien entendu, la taille de Boukman, ni celle de Macandal, n'a jamais attiré l'attention des témoins oculaires. D'ailleurs, des leaders de la révolution haïtienne, seul Henry Christophe était doté d'un physique imposant (24). Et rares furent les chefs de troupes - à l'exception d'Alaou (25) - à la corpulence extravagante. Malheureusement, l'historien haïtien n'éprouve aucun mal à retransmettre les stéréotypes coloniaux et dégradants à son peuple qu'il prétend vouloir instruire pour un avenir meilleur.

L'unique lien existant entre Boukman et la Montagne Bleue
Finalement, voilà qu'en septembre 1791, au moment où Boukman combattait les colons, l'assemblée coloniale de Saint Domingue a fait une demande de prêt auprès de la Jamaïque afin de pouvoir soutenir financièrement les propriétaires du Nord dévastés. En supplément, les Français ont fait suite à la proposition de Bryan Edwards, un représentant de la Jamaïque, en demandant officiellement aux Jamaïcains, l'envoie d'esclaves de la Montagne Bleue qui sont réputés de soumettre des esclaves rebelles :


"Le présent arrêté sera présenté à M. le Lieutenant au gouvernement général et représentant de Sa Majesté dans la colonie, pour avoir son approbation, et être par lui adressé au lord Effingham, avec pièce de le communiquer à l'assemblée de la Jamaïque.
L'un des membres a observé, que les ateliers étant toujours en révolte, et n'ayant point de troupes de ligne à espérer, il croyait qu'il était de la sagesse de l'assemblée de profiter de l'ouverture qu'avait fait M. Edouards, que peut-être le gouverneur de la Jamaïque consentirait à nous envoyer les Nègres de la montagne Bleue, seule troupe employée dans cette île pour soumettre les esclaves rebelles.
Cette motion appuyée, l'assemblée arrête que son président s'entendra avec M. le Lieutenant au gouvernement général, pour demander au gouverneur de la Jamaïque le Nègres de la montagne Bleue." (26)
En fin de compte, la Jamaïque britannique hostile aux Français, n'a pas fourni à Saint Domingue les troupes noires de la Montagne Bleue, quoique le Commissaire Garran-Coulon prétendit que la Jamaïque était ouverte à cette proposition (27). Mais l'ironie de l'histoire veut que, non seulement Boukman ne provenait pas des Montagnes Bleues de la Jamaïque, il était potentiellement l'ennemie de ces Jamaïcains noirs qui étaient les alliés des colons contre d'autres Noirs en quête de liberté.
De plus, c'est dû à la réputation belliquese des Jamaïcains noirs de la Montagne Bleue, que Victor Hugo, dans son roman Bug-Jargal (1826) plaça son personnage Boukman comme originaire de la Montagne Bleue. Mais le romancier n'aurait jamais imaginé que des historiens auraient pris pour un fait historique, ce qui n'était que pure fiction.

3- Voilà 12 personnes nommées Boukman dans la colonie :

Boukman #1 : 26 janvier 1750, Bouqueman, est un Noir du Cap qui fut complice de l'enlèvement d'une jeune femme :

"Demeurant au Cap, où elle a resté trois jours, que de là elle fut chez M. Delarue, ensuite chez Mme Beauval, à la case du nommé Bouqueman, où elle aurait été arrêtée marrone quelques temps auparavant, et de là, conduite par ledit Nègre à son père sur l'habitation Carbon au Bois de Lance, où elle a presque toujours resté depuis, et ce, dans la vue de forcer ledit frère Lavaud de la vendre." (28)

Boukman #2 : 15 décembre 1757, enterrement de Pierre Boukman, est un colon français :




“Enterrement de Pierre Boukman - Aujourd'hui quinzième décembre mil sept cent cinquante et sept a été inhumé dans le cimetière de cette paroisse le corps de Pierre Boukman natif de Luré en Flandre. Agé de trente six ans, décédé à l'hôpital, muni du sacrement de pénitence…” (29)

Boukman #3, 4 : en 1761, dans un inventaire de la Sucrerie Saint-Michel située à Pointe d’Icaque (Nord), nous avons 2 Blanches ayant Bouquemen comme nom de famille 

"Il est intéressant de trouver deux femmes qui s’appellent Bouquemen, nom du premier chef des révoltés de 1791. Bouquemen créole « vieille » et Cécile Bouquemen Guillebedau, se trouvent côte à côte sur la liste. Elles sont peut-être mère et fille." (30)

Boukman #5 : 10 février 1776, « Bouquemant » est-ce un Créole « marchant de menthe »?

"Au Cap, le 4 de ce mois, Bouquemant, créole, étampé illisiblement, lequel a dit appartenir à M. Le Conte, Procureur de l’Habitation Portelance" (31)

Boukman #6 : 5 octobre 1779, "Bouqueman" est un chasseur dangereux du Nord-Est âgé de 40-42 ans :

"Trois Nègres nommés Bouqueman, chasseur ; Jean-Jacques, créole, cocher, sans étampe, & David, étampé X, Nègre de Guinée, sont partis marons de l'Habitation de M. Cailleau aîné & de Mde veuve Dorlic, à Maribaroux [Nord-Est] : les deux premiers, âgés de 40 à 42 ans, sont deux sujets des plus dangereux qu'il est important d'arrêter, l'un taille de 5 pieds 3 pouces, figure ronde, les yeux petits & d'un regard farouche ; le cocher, taille de 5 pieds 4 pouces, les yeux enfoncés, les narines ouvertes, grande bouche, lui manquant des dents de devant, les jambes cambrées & jetant de côté de la gauche en marchant, ce dernier évadé avec un nabot, une chaîne & des serre-pouces. Ceux qui les reconnaîtront, sont priés de les faire arrêter & transférer dans les cachots les plus voisins & avec le plus de sureté possible, & d'en donner avis au Sieur Dorlic, à Maribaroux." (32)

Boukman #7 : 19 décembre 1780 "Bouqueman" est un Congo âgé de 55 ans : 

"Au Fort-Dauphin, est entré à la Geole (...) le 5, Louis, Congo, étampé sur le sein droit IVCHEREAU, âgé de 30 ans, se disant appartenir à l'Habitation de M. de Juchereau, au Trou ; Bouqueman, même nation, âgé de 55 ans, étampé sur le sein droit FLEURY, se disant appartenir à M. de Fleury, à Jacquesy." (33)

Boukman #8, 9 : en 1783, 2 autres femmes blanches nommées "Bouqueman" et "Bouquemen", se retrouvent sur l'inventaire de la Sucrerie Baudin du Quartier Morin :

"Ayant déjà noté sur la sucrerie voisine de Saint-Michel deux femmes qui s'appellent Bouquemen, c'est surtout curieux de trouver ici une "Geneviève Bouqueman" âgée de 71 ans, et une "Bouqueman noire" qui morte récemment âgée de 69 ans. Il n'est pas sûr qu'elles soient créoles, mais dans l'inventaire de 1761 on trouve une Bouqueman et une Bouqueman Cécile, toutes deux nées à Saint-Domingue, ou du moins aux Antilles. Doit-on voir dans ce nom une référence aux "Isles des Débouquements", nom qui à  l'époque désignait les isles Bahamas et Turques et Caïcos exportatrices à l'occasion d'esclaves?" (34)

Boukman #10, 11 : le 30 août 1812, à New York, on enterra en "sol catholique", la Dominguoise Marie Bouquement, la mère d'Adèle Bouquement restée à Saint Domingue :

"Marie Bouquement died the last week in August, 1812. She was buried on August 30th of that year in the "Catholic ground," the new cemetery at Prince and Mulberry Streets where the Cathedral of St. Patrick was being built." (35)
Traduction :
"Marie Bouquement est décédée la dernière semaine d'août 1812. Elle a été enterrée le 30 août de cette année-là en "sol catholique", le nouveau cimetière des rues Prince et Mulberry où la cathédrale de St. Patrick était en construction."
Marie Bouquement est née en 1757 dans la colonie de Saint Domingue ; plus précisément à Saint Marc, dans la région de l'Artibonite. Comme sa mère Zénobie Julien, elle fut une Créole. Sa grand-mère Tonette, elle, naquit en "Afrique". Donc, aucun lien islamique ne peut être établi avec son patronyme Bouquement, que l'on écrivit aussi Boucman. (36) D'ailleurs, Marie Bouquement fut la tante de Pierre Toussaint, béatifié Vénérable par le Pape Jean Paul II le 17 décembre 1996.

(Vénérable Pierre Toussaint)
Source : Bishop Norbert Dorsey, CP. Pierre Toussaint of New York : Slave and Freedman. New York, 2014.

Affranchie le 20 janvier 1796, Marie Bouquement débarqua à New York en 1797 à l'âge de 40 ans. (37) Elle y accompagna des membres de la famille Bérard dont elle fut captive (esclave) un an auparavant. Le jeune captif (esclave) Pierre Toussaint, fils de sa petite soeur Ursule Julien Toussaint, était du voyage. Marie Bouquement a appris à lire des Bérard, et non pas d'une quelconque influence islamique. Et tel fut le cas pour sa mère Zénobie, sa soeur Ursule et son neveu Pierre Toussaint.


(Lettre de Zénobie Julien à son petit-fils Pierre Toussaint)
Source : Pierre Toussaint Papers, NY Public Library. in : Jean Fouchard. Les marrons du syllabaire. (2ème édition) Port-au-Prince, 1988. planche 8.
 
(Lettre de Pierre Toussaint à William Schuyler)
Source : Pierre Toussaint Papers, NY Public Library. in : Jean Fouchard. Les marrons du syllabaire. (2ème édition) Port-au-Prince, 1988. planche 7. 
 
Ces lettres réfutent le mensonge disant que les colons de Saint Domingue punissaient les captifs (esclaves) qui savaient lire. Mensonge sur lequel se base la thèse révisionniste d'un Boukman Dutty lettré, et d'une fausse association de l'écriture dans les colonies à l'islam. Après tout, Pierre Toussaint, catholique dévoué, devenu prospère, contribua financièrement à la construction du Old St. Patrick Cathedral de New York. Des oeuvres de ce type lui vaudront d'être béatifié. Précisons que les données généalogiques sur Pierre Toussaint diffèrent de ce que prône la majorité des historiens.**

Boukman #12 : en 1816,*** "Bouqueman" est Lieutenant du Roi Henry à Ennery :





"Lieutenant du Roi à Ennery.
M. de Bouqueman, capitaine, C...
M. Toussaint Guillaume, sous-lieut, adjudant d'armes.
(...)
Ordre Royal et Militaire de Saint HENRY, créé le 20 Avril 1811.
Promotion du 28 Octobre 1815, an douze.
Messieurs,
(...)
de Jean Cochet.
d'Étienne Gilot.
de Bouqueman.
de Julien Gillot.
de Lubin." (38)


Comme nous venons de le voir, il se trouvait des gens de toutes races et couleurs, des deux sexes, de tous âges, et d'ethnies diverses qui s'appelaient Boukman, dans la colonie de Saint Domingue. Car Boukman était un nom en rien différent de Jean-Jacques ou de Joseph, etc. Aucun élément de ce nom avait de lien soit avec la langue anglaise ou avec l'île de la Jamaïque. Dans un article ultérieur, nous développerons l'origine du patronyme Boukman, comment il parvint dans la langue française, puis attribué aux captifs (esclaves).


4- "Dutty" dans "Boukman Dutty" ou "Dutty Boukman" n'est pas fondé

Le patronyme Dutty est considéré, en particulier dans les pays anglophones de la Caraïbe, comme une preuve que Boukman fut originaire de la Jamaïque ; renforçant ainsi la fausse thèse islamique. Comme beaucoup, j'ai longtemps considéré une filiation jamaïcaine au héros haïtien Boukman telle un pont aidant à combler le fossé culturel et historique qui éloigne Haïti du monde caribéen. Mais cet écart ne peut être comblé par des fabulations qui, tôt ou tard, s'effritent.**** Il sera comblé uniquement par la vérité historique telle que l'origine caribéenne du roi Henry (Christophe) d'Haïti qui "fut originaire de l'île de la Grenade", (39) d'après son propre Secrétaire, le Baron Pompée-
Valentin de Vastey ;
ou en s'appuyant sur la résistance factuelle de captifs caribéens dont les archives de Saint Domingue font état, comme l'exemple de ce captif jamaïcain qui, en 1780, s'évada de sa plantation du Morne-Rouge, lieu de la rencontre ayant déclenchée la révolution haïtienne :


"Un Nègre nommé Lubin, créole de la Jamaïque, âgé d'environ 24 ans, taille de 5 pieds 4 pouces, étampé sur le sein droit GUILLAUME COSQUIER, est parti maron depuis environ trois semaines avec un canot de 17 pieds de long. Ceux qui le reconnoîtront, sont priés de le faire arrêter & d'en donner avis à M. Guillaume Cosquier, Habitant au Morne-Rouge." (40)
Alors, comment est-ce que le nom de famille Dutty entra dans la danse, on peut se demander? Eh bien, en 1853, Dutty a été attribué à Boukman comme nom de famille par l'auteur haïtien Céligny Ardouin qui n'a fourni aucune référence :


"Toussaint fit choix de ses plus intimes amis+, Jean-François Papillon, Georges Biassou, Boukman Dutty et Jeannot Billet. Les conjurés se réunirent ct se distribuèrent les rôles. Plus rusé que les autres, Jean-François obtint le premier rang++, Biassou le second; et Boukman et Jeannot, plus audacieux, se chargèrent de diriger les premiers mouvements." (41)
Il est imprudent de croire Ardouin sur parole, sachant qu'il écrivait sur des événements ayant eu lieu 62 ans plus tôt. À ce jour, aucune donnée archivée ne relie Boukman au nom Dutty. Quant à l'affirmation selon laquelle Dutty était le nom d'un planteur jamaïcain, elle n'a pas été prouvée non plus.
En raison de la consonance anglaise du nom Dutty retrouvé en terre francophone de Saint Domingue (Haïti), on est tenté d'attribuer
à ce nom une origine anglaise externe. Mais, même si Boukman s'appelait également Dutty, cela ne signifierait pas automatiquement qu'il provint d'une colonie anglophone. Car, les données historiques dénotent ce nom dans la colonie indépendamment d'une source anglaise. Par exemple, en 1766 (25 ans avant Bois Caïman), dans cette annonce de marronnage, à Fort Dauphin (Fort Liberté, au Nord-Est de Saint Domingue) on rechercha un mulâtre issu de la colonie française de la Martinique nommé Jean dutie :


"Un Mulâtre, se disant libre, de la Martinique, & se nommer Jean Dutie, étampé sur le sein droit RIMEAV,  & sur le gauche illisiblement." (42)

Voici l'annonce de marronnage dans son entièreté. La référence à Jean Dutie est située au bas :
 

Mis à part Jean Dutie, il y avait plusieurs annonces de marronnage faisant état de captifs étampés DUTY. Et jamais, dans ces cas, mention fut faite d'une filiation anglaise à ces captifs, ni à leurs propriétaires. Par exemple, cette annonce dâtée de 1767 (24 ans avant Bois Caïman) traite de Pallanqué, un captif reconnu portugais, qui était étampé DUTY et dont le propriétaire était un certain Sr. Duty de Port-de-Paix (Nord-d'Ouest de Saint Domingue) :


 "Un Negre Portugais, nommé Pallanqué, étampé sur les deux seins DUTY & au dessous PP, âgé d'environ 40 ans, taille de 5 pieds 5 pouces, rouge de peau, est maron depuis le 28 avril. Ceux qui le reconnoîtront sont priés de le faire arrêter & d'en donner avis au Sr. Duty, Passager du Port-de-Paix, demeurant audit lieu; il y aura une quadruple de récompense." (43)
Dans ce cas-ci, Pallanqué, le captif, peut être attribué le nom de son propriétaire. On peut donc,  comme ce fut la norme dans la colonie, l'appeler Pallanqué Duty. Tout comme pour Boukman, la plupart des gens d'aujourd'hui croiraient facilement, en raison du nom de famille Duty à consonance anglaise, qu'il provint d'une colonie anglaise. Mais, en attestant que Pallanqué Duty, provenait en fait d'un territoire de langue portugaise, cette annonce de marronnage prouve que le nom Dutty, attribué arbitrairement à Boukman par Céligny Ardouin, n'est pas preuve d'une origine anglaise. D'ailleurs, rien dans l'annonce de marronnage de 1767 suggère que même le propriétaire, Sr. Duty, était Anglais ou qu'il fut étranger à la colonie.
Voici une autre annonce faisant référence au même Sr. Duty. Placée par la prison de Port-de-Paix, cette annonce est datée du mois d'août 1781, soit 10 ans avant Bois Caïman :

"'Le 11, Jean-Baptiste, Congo, étampé sur le sein droit I DVTY et au-dessous PP, âgé d'environ 25 ans, taille de 4 pieds 9 pouces, se disant avoir appartenu au Sr Duty et actuellement au Sieur Dupon, Habitant au Borgne." (44)
De plus, nous avons déniché d'autres cas de captifs étampés DUTY, et, toujours, sans aucun lien anglophone. Cela nous indique que le nom Duty entra dans la généalogie française bien avant l'implantation de l'esclavage transatlantique et la colonie de Saint-Domingue :

a) Étampé JOYNEAU & DUTY :

"Un Nègre appellé Bouis Chouchou, appartenant aux mineurs Joyneau, étampé JOYNEAU & DUTTY, affermé au Sieur Videlet, habitant au quartier de Saint-Louis. Ceux qui le reconnaîtront, sont priés de le faire arrêter. Il y aura récompense." (45)
b) 2 captifs étampés DUTY :
"Toussaint Dupon âgé de 28 ans : Toussaint Casalis âgé de 24 ans : César âgé de 26 ans ; ces six derniers sont de nation Congo, & sont étampés E DUPON : Laurent de nation Congo, âgé de 40 ans, étampé A CRUCHET, Léon âgé de 18 ans : Monplaisir âgé de 23 ans : Marsias & Darius, âgé de 20 ans ; ces quatre derniers sont de nation Congo, & sont étampés E. DUPON : Augustin âgé de 22 ans, étampé DUTY : Augustin de nation Mayombé, âgé de 22 ans, étampé E DUPON. (...) Joseph âgé de 26 ans, étampé DUTY : tous les Nègres ci-dessus sont partis marrons de l'habitation de madame veuve Dupont, dans les hauteurs du Bas de Saint-Anne : en donner des nouvelles à ladite Dame, ou à M. Louis Foucher au Cap-Français." (46)
c) Étampé DOUTTÉ & S. LAPALIERE :
"François de nation Congo, âgé d'environ 40 ans, de la taille de 5 pieds 4 pouces, étampé DOUTTÉ & S. LAPALIERE, la dernière étampe ayant la forme d'un croissant, est parti marron depuis un an..." (47)


* D'après le Dictionnaire Littré de la langue française, "bouc" proviendrait du Wallon, langue belge. (Littré, 1976 : 379). 
** Le dévouement aveugle de Pierre Toussaint à cette famille Bérard l'ayant mis et sa famille en captivité (esclavage) est méprisable. Son acceptation de la domination blanche et son rejet de l'émancipation noire est condamnable. Toutefois, son implication dans des oeuvres caritatives pionnières telles que école et orphelinat pour enfants noirs de New York le rend estimable. Ce pourquoi nous lui accordons notre attention dans cette étude.
De fausses informations persistent, notamment quant à la date et le lieu de naissance de Pierre Toussaint et concernant le nom de son propriétaire initial. Dissipons les brièvement.
1) Tous s'entendent pour dire que Pierre Toussaint est né en captivité (esclavage) à Saint Domingue, dans la région de l'Artibonite. Toutefois, on déclare à tort qu'il est natif de Saint Marc. Car Pierre Toussaint est plutôt venu au monde dans la localité de La Petite-Rivière de l'Artibonite qui ne dépend pas pour autant de la grande ville qu'est Saint Marc. Comme ces 2 cartes l'illustrent, La Petite-Rivière de l'Artibonite et Saint Marc forment 2 lieux distincts :

(Emplacement de la localité de La Petite-Rivière de l'Artibonite, en Haïti)
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Petite-Rivi%C3%A8re-de-l%27Artibonite

(Emplacement de la ville de Saint Marc, en Haïti)
Source : https://fr.wikipedia.org/wiki/Saint-Marc_(Ha%C3%AFti)

2) Le propriétaire initial de Pierre Toussaint se nommait Jean-François Bérard du Pithon. De 1781 à 1788, Jean-François Bérard du Pithon fut "capitaine d'infanterie et commandant de la paroisse de La Petite-Rivière de l'Artibonite", où il résida pendant 44 ans. Suite à des problèmes de santé, il a prit congé le 14 mai 1785 pour se faire soigner à Bordeaux en France. Il a recevra de l'armée des prolongements de séjour successifs jusqu'à sa retraite en 1788, (48) soit 3 ans avant l'éruption de la Révolution haïtienne en 1791.
3) En 1793-1794, le Commissaire Civil Sonthonax affranchis les captifs (esclaves) de Saint Domingue. Cependant, les nouveaux libres sont tenus de demeurer sur leurs habitations respectives comme salariés. Pierre Toussaint et sa famille restèrent fidèles à l'habitation Bérard, quoique nombre d'autres anciens captifs (esclaves) ont délaissé la place.
Le 5 juillet 1795, le patriarche Jean-François Bérard du Pithon décéda en France. (49) La totalité de ses enfants était alors installée à Paris, sauf son fils aîné, Jean-Jacques Bérard du Pithon qui fut le dernier héritier resté sur l'habitation. Il s'accommodera des anciens captifs (esclaves) de son père devenus ses serviteurs et employés.
Au 11 avril 1796, Jean-Jacques Bérard épousa sa seconde femme Adélaïde Marie Elisabeth Bossard, native de Dondon (à Saint Domingue), elle aussi à son second mariage. Un an plus tard, le 21 août 1797, fuyant les troubles révolutionnaires de Saint Domingue, le couple s'exilera à New York. (50) L'accompagneront, entre autres, 5 serviteurs dont Pierre Toussaint, sa petite soeur Rosalie Toussaint, et leur tante Marie Bouquement. Quoiqu'affranchis selon la loi en vigueur à Saint Domingue, ces serviteurs ont pourtant choisi de suivre leurs anciens maîtres à l'étranger où ils redeviennent des captifs (esclaves), car ne possédant pas, à l'exception de Marie Bouquement, d'actes individuels d'affranchissement. On qualifie à tort d'Haïtiens, Pierre Toussaint et ces Dominguois noirs dépourvus de la noblesse d'une nationalité dessaliniène.
Rentré à Saint Domingue pour mettre de l'ordre dans ses affaires, Jean-Jacques Bérard y décéda de maladie le 12 septembre 1799. (51) Sa veuve Élisabeth Bossard Bérard se remariera le 11 août 1802 avec Jean-Baptiste Gabriel Nicolas, un expatrié originaire d'Aquin à Saint Domingue. Cette union sera officialisée le 15 janvier 1803. (52) Et grâce à son métier de coiffeur de luxe, Pierre Toussaint surviendra aux besoins de ce couple démuni. Élisabeth Bossard, dite Madame Bérard Nicolas, émancipera  Pierre Toussaint le 2 juillet 1807, au Commissaire de France à New York (53) ; et non pas sur son lit de mort comme le disent tous. (54) Cet affranchissement sera validé par les autorités consulaires le 14 juillet de cette même année.
4) Hannah Farnham Sawyer Lee, la première à écrire sur Pierre Toussaint, a fait savoir que ce dernier, qu'elle connaissait, est né en 1766. (55) Depuis lors, cette date est retenue par les historiens. L'hypothèse de 1766 voudrait dire que Pierre Toussaint serait 9 ans plus jeune que sa tante maternelle Marie Bouquement. Car cette dernière, âgée de 40 ans lors de son arrivée à New York en 1797, est née en 1757, comme nous l'avons souligné. Mais cet écart de 9 ans n'est pas concevable, étant donné que Marie Bouquement fut la première née de Zénobie Julien, et la grande soeur d'Ursule Toussaint, la mère de Pierre. D'ailleurs, Pierre Toussaint ne fut même pas le premier enfant de sa mère Ursule. Il fut le troisième, suivant sa soeur aînée Marie-Louise Pacaud et leur frère aîné Antoine dit Toussaint. (56)
Nous dirons même qu'il est impossible que Pierre Toussaint soit né en 1766, puisque sa marraine est née 10 ans après la date proposée. Cette marraine que Pierre Toussaint appelait simplement Mademoiselle De Pointe et que les Parisiens désignaient Aurore Bérard, (57) elle est en effet Marie Elizabeth Etiennette Bérard, la dernière fille de Jean-François Bérard et de son épouse Marguerite Victoire Magnan. Son acte de baptême témoigne qu'elle est née le 8 décembre 1776 à La Petite-Rivière de l'Artibonite.



(Extrait de baptême de Marie Elizabeth Etiennette Bérard dite Aurore Bérard)
Source : ANOM, État civil. Saint-Domingue, Petite Rivière de l'Artibonite, 1776 ; Lien permanent : http://anom.archivesnationales.culture.gouv.fr/caomec2/osd.php?territoire=SAINT-DOMINGUE&commune=PETITE-RIVIERE-DE-L%27ARTIBONITE&annee=1776
 
Marie Elizabeth Etiennette Bérard dite Aurore, fut mineure lorsqu'elle devint marraine de Pierre Toussaint. Elle-même avait une marraine mineure (âgée de 15 ans), sa cousine germaine Marie-Louise Elizabeth François Audigé, née aussi un 8 décembre, mais en 1761. (58) La marraine et cousine maternelle d'Aurore est la fille de Marie Louise Gabrielle Magnan. 3 jours après avoir accouché d'elle, celle-ci est morte de complications le 11 décembre 1761. (59)
5) L'année exacte de la naissance de Pierre Toussaint se révèle nettement plus compliquée à déterminer. L'auteur Arthur Jones (60) se base sur le fait que le coiffeur Pierre Toussaint confia à Madame Brochet, une cliente parisienne de passage à New York, qu'il fut camarade de jeu de sa marraine Mademoiselle De Pointe dite Aurore Bérard. (61) D'après Arthur Jones, 5 ans constituerait l'écart d'âge maximal pour que puisse s'établir une relation de jeu entre 2 enfants. Donc, sa marraine Aurore Bérard étant née en 1776, Pierre Toussaint serait né au maximum, 5 ans plus tard, en 1781.
Arthur Jones analysa aussi l'affranchissement que Pierre Toussaint procura à sa petite soeur Rosalie, afin qu'elle soit une personne libre lors de son mariage, une semaine plus tard, avec Jean Noël. L'acte d'affranchissement de Rosalie Toussaint au 21 mai 1811 dévoile qu'elle était âgée de 25 ans en cette année. Cela signifie qu'elle est née en 1786. Arthur Jones déduit ensuite que Pierre Toussaint était camarade de jeu de sa soeur Rosalie. (62) En effet, dans leur jeunesse à Saint Domingue, les 2 suivaient à la trace la jeune marraine de Pierre, et souvent dansaient pour son amusement. (63) Par conséquent, toujours selon Jones, Pierre Toussaint serait au plus 5 ans plus vieux que sa soeur Rosalie née en 1786. Ainsi, Pierre Toussaint naquit au plus tard en 1781.
Nous pensons que la date de naissance de Pierre Toussaint se situe effectivement entre 1781 et 1785. L'année de 1781, jusqu'à preuve du contraire, demeure la date médiane la plus plausible. Mais nous ne pouvons pas en dire autant pour 1766 qui donnerait Pierre Toussaint 20 ans de plus que sa soeur Rosalie.
6) Si l'année de naissance de Pierre Toussaint, d'après notre analyse, se situe entre 1781 et 1785, le jour de son anniversaire offre plus de certitude. Les historiens ont retenu le 27 juin. Toutefois, l'auteur Bishop Norbert Dorsey soulève un doute. (64) Il argumente que la détermination du 27 juin provient d'un souhait de bon anniversaire qu'Euphémia, la nièce et fille adoptive de Pierre Toussaint, l'a adressé dans une lettre du 27 juin 1825. Or, poursuivit l'auteur, Euphémia Toussaint avait l'habitude d'écrire à son oncle le vendredi, et que Pierre Toussaint lisait ses lettres le samedi. Il aurait donc une incertitude entre le jour de l'écriture de la lettre (vendredi) et le jour de la lecture de cette lettre (samedi). Lequel serait le jour de l'anniversaire en question?
Après avoir jeté un coup d'oeil là-dessus, nous affirmons que le 27 juin est le jour qui convient, étant donné que la lettre d'Euphémia fut écrite un lundi. Car contrairement à l'argument de Bishop Norbert Dorsey, le 27 juin 1825 fut un lundi et non un vendredi. Ainsi, la lettre d'Euphémia fut écrite et lue le jour même, le 27 juin, jour d'anniversaire de son oncle Pierre Toussaint.
*** 1816 était clairement 12 ans suite à l'indépendance de l'État d'Hayti. Toutefois, le Lieutenant de Bouqueman était né et nommé dans la colonie de Saint Domingue.
**** Voici une exemple parfaite des fabulations malhonnêtes qui circulent concernant l'origine jamaïcaine de Boukman. Cette fabulation provint de la
CARICOM Reparations Commission, une branche de la CARICOM (La Communauté caribéenne), une institution internationale composée de 15 états membres, et de multiples autres associés et observateurs. La CARICOM Reparations Commission proposa dans un tweet révisionniste, une photo de Boukman, le supposé Jamaïcain sachant lire :

(Tweet et photo erronés proposés par CARICOM Reparations)
Source : https://twitter.com/CariReparations/status/782675957828071424/photo/1

Or, la photographie n'était même pas inventée en 1791, date de la mort de Boukman Dutty. D'ailleurs, la photo proposée et portant l'étampe de la CARICOM Reparations Commission, est en fait celle de Ño Remigio Herrera "Adechina", un Babalawo afro-cubain légendaire :

(Photo de Ño Remigio Herrera prise en 1891)
Sources : Musée de La Regla. In : David H. Brown. Santeria Enthroned: Art, Ritual, and Innovation in an Afro-Cuban Religion. Chicago, 2003. p. 64. (fig. 2.1) ; http://theasefountain.tumblr.com/post/5222527904/diasporic-heroes-4-adechina-remigio-herrera 

Cette photo fut prise à la Havane (Cuba) en 1891, soit exactement 100 ans après la mort de Boukman. Car Ño Remigio Herrera, dit "Adechina" est né au Nigeria aux environs de 1811. Il fut transporté comme captif (esclave) à La Regla, à Cuba en 1830 où il introduisit le culte ancestral de Ifa. Et grâce à ses talents de Babalawo (grand officiant de la religion traditionnelle Yoruba), il gagna sa liberté et devint un homme d'affaires prospère. Il décéda âgé, le 27 janvier 1905. (65)
Voici d'autres photos de Ño Remigio Herrera "Adechina", et celle de sa fille Josefa "Pepa" Herrera, également grande officiante traditionaliste :

Source : https://face2faceafrica.com/article/remigio-herrera-the-nigerian-slave-who-heavily-influenced-cuba-as-a-mystic-in-the-1800s


Source : https://myspace.com/spectralphil/mixes/classic-awos-ni-orunmila-iyalochas-y-babalochas-famosos-454596


(Jofefa "Pepa" Herrera, fille de Ño Remigio Herrera "Adechina")
Source : Musée de La Regla. In : David H. Brown. Santeria Enthroned: Art, Ritual, and Innovation in an Afro-Cuban Religion. Chicago, 2003. p. 66. (fig.2.2) ; https://myspace.com/spectralphil/mixes/classic-awos-ni-orunmila-iyalochas-y-babalochas-famosos-454596/photo/182468643

Voici une autre exemple de falsification. En dépit de l'évidence que la photographie ne fut pas inventée du vivant de Boukman, mort en novembre 1791, cette fausse photo-ci reliée au nom de Boukman circule en ligne :


(Photo falsifiée dite de Boukman Dutty en 2017)
Source : https://agoraafricaine.info/2017/12/13/en-1791-le-pretre-haitien-dutty-bookman-se-servit-du-vaudou-pour-vaincre-les-armees-de-louis-14/

Les falsificateurs prennent toujours le soin de rogner la photo originale, afin de dissimuler les inscriptions démontrant qu'il ne s'agit pas de Boukman :

"Papa Loi (sorcier haïtien) prêtre de la Religion Vodou."
Source : https://universalayititoma.tumblr.com/page/7

Mais "Fort de France (Martinique)" inscrit à la main ne correspond pas à description imprimée de "sorcier haïtien". Cette seconde photo précise l'identité du personnage. Il s'agit de Papa Pierre, un Papa Lwa, Houngan ou grand officiant traditionaliste haïtien :

  "Un Papa-Loi (Sorcier) - Papa Pierre"
Sources : Kiran Jayaram. "Digging the Roots, Or, Resistance and Identity Politics of the Mouvman Rasin in Haiti", thèse, 2003, Appendix A. ; https://universalayititoma.tumblr.com/page/32

Cette seconde photo de Papa Pierre fut prise en 1905 ou en 1908, selon des différentes sources. Elle servit même de carte postale :

 (Carte postale haïtienne du Houngan Papa Pierre)
Source : https://cartespostales.eu/hati/108658-HAITI_-_Un_Papa-Loi__Sorcier__-_Papa_Pierre_-_Pr_tre_Vaudou_-_tr_s_bon__tat.html ; Lewis Ampidu Clorméus. "HAÏTI (1911-1912) : Contribution à une historiographie". In : Histoire, monde et culturres religieuses. 2012/4 n° 24. pp. 105-130. (p.112)

Les initiales F. D. suggèrent que cette carte postale (pas la photo) provient de l'époque "indigéniste" de François Duvalier (1957-1971). Bref, nous ne sommes pas au bout de nos peines. Car, les malhonnêtes et les paresseux, en quête de notoriété ou de légitimité, ne cesseront point de falsifier des documents historiques, de la manière la plus flagrante.

+ La déclaration d'Ardouin est fausse, car Toussaint, un ancien esclave devenu lui-même esclavagiste, ne fut pas le cerveau de la révolution, comme beaucoup aiment le croire. Ce fut Jean-Jacques, commandeur de la plantation des Manquets (Noé) à L'Acul (Nord) qui a conçu le tout, dans l'intervalle d'une décennie. (Sera développé ultérieurement)
++ Contrairement à la croyance populaire, Boukman n'était pas le chef de l'insurrection ; Jean-François (le Roi) l'était. Il n'a pas non plus été second en grade ; Biassou (le Vice-Roi) l'était. Voir : "Boukman n'était pas le chef de la révolution haïtienne" pour plus de détails.




Notes
(1) https://dictionnaire.reverso.net/francais-definition/bouc
(2) Pamphile de Lacroix. Memoires pour servir a l'histoire de la revolution de Saint-Domingue. (2e édition) Paris, 1820. p.v.
(3) Prophète Joseph. Dictionnaire Haïtien-Français. Montréal, 2003. p.20.
(4) Comte de Chesnel. Encyclopédie militaire et maritime, Volume 1. Paris, 1864. p.57.

(5) Le Dictionnaire Littré de la langue française de 1976, à la page 390. 

(6) Moreau de Saint-Méry. Description topographique, physique, civile, politique, Tome 1. Philadelphie, 1796. pp.129-130.

(7) Les affiches américaines du mercredi 13 juillet 1768. Parution no.28. p.227.
(8) Jacques Nicolas Bellin. Description des débouquements qui sont au nord de l'isle de Saint Domingue. Paris, 1768. p.2.

(9) Les affiches américaines du mercredi 13 juillet 1768. Parution no.28. p.227.
(10) Beaubrun Ardouin. Études sur l'histoire d'Haïti. Volume 1, Paris, 1853. pp.219-220.

(11) Pierre François Page. Traité d'économie politique et de commerce des colonies, Tome 2. Paris, 1801. p.xxxviii 

(12) Phillipe Lattre. Campagnes des Français à Saint-Domingue. Paris, 1805. pp.47-48.

(13) « Notes de M. Leclerc, procureur-syndic du Limbé, commissaire du gouvernement près du tribunal criminel du Cap français, sur la brochure de M. Gros », AN, Col. CC9a 5. 

(14) Yves Bénot. "The insurgents of 1791, their leaders and the concept of independence". In: David Patrick Geggus, Norman Fiering. The World of the Haitian Revolution. Bloomington, 2009. pp.99-110.

(15) Henri Baptiste Grégoire. De la littérature des Nègres ou recherches de leurs facultés. Paris, 1808. p.107.

(16) Placide Justin, James Barskett (Sir.). Histoire politique et statistique de l'île d'Hayti: Saint-Domingue... Paris, 1826. p.206.

(17) Victor Hugo. Bug-Jargal, Paris 1826. p.43.

(18) Gaspard Théodore Mollien. Histoire ou Saint Domingue. Tome 1. Paris, 1831, réed. 2006. p.72.

(19) Saint-Rémy "Vie de Toussaint-L'Ouverture. Cayes, 1850. p.19.

(20) J.-C. Dorsainvil & F.I.C. Manuel d'histoire d'Haiti. Port-au-Prince. 1925. réed.1942. p.64.

(21) "Jean François, Biassou et quelques autres, que leur taille, leur force et d'autres avantages corporels semblaient désigner pour le commandement.” Beaubrun Ardouin. Études sur l'histoire d'Haïti. Volume 1. Paris, 1853. pp.230-231.

(22) "Ce nègre [Macandal], déjà remarquable par sa taille de titan, sa force herculéenne, l'était encore bien davantage par son origine et son intelligence." Revue du monde colonial, asiatique et américain: organe politique ..., Volume 12. Paris, 1864. p.448.

(23) "Une négresse de taille gigantesque [Cécile Fatiman] (...) fit son apparition. On eût dit que ses yeux lançaient des étincelles." Bulletin international des études créoles, Volumes 13-15, AUPELF, 1990 - Creole dialects, French. 24.

(24) "[Henry] Christophe was tall, strong, and handsome, with bright, flashing eyes — "a fine portly looking man," as a British naval officer who visited Haiti in 1818 describes him." [Traduction] : "
[Henry] Christophe était grand, fort et beau, avec des yeux brillants et étincelants "un bel homme bien potelé", comme un officier de la marine britannique qui s'est rendu en Haïti en 1818, l'a décrit." Earl Leslie Giggs & Clifford H. Prator (ed). Henry Christophe & Thomas Clarkson: A Correspondance. Berkely & Los Angeles, 1952. pp.38-39.

(25) "Les insurgés du Cul-de-Sac avaient à leur tête un africain, nommé Halaou, d'une taille gigantesque, dune force herculéenne." Thomas Madiou. HIstoire d'Haïti, Tome 1. Port-au-Prince, 1847. p.181.

(26) Mémoire de l'assemblée générale de la partie Française de Saint-Domingue, concernant l'emprunt qu'elle se propose de faire à la Jamaïque. (25 septembre 1791). in : La Gazette de Saint-Domingue. du Mercredi 2 Novembre 1791. Parution No.88. p. 1008. 


(27) Garran-Coulon. Rapport sur les troubles de Saint-Domingue, fait au nom de la Commission des colonies, des Comités de salut public, de législation et de marine, réunis. Tome 2. p.246.

(28) Moreau de St Méry. [A.N. COLONIES P.88]" in : Pierre Pluchon. Vaudou, sorciers, empoisonneurs: de Saint-Domingue à Haiti. Paris, 1987. p.185.

(29) (ANOM) Archives Nationale d’Outremer), État civil de St-Domingue, par. 33 (Port-au-Prince/Saint-Domingue), 1757, p./vue 38

(30) David Geggus. “Les esclaves de la plaine du Nord à la veille de la Révolution française, pt 1." in: Revue de la Société haïtienne d'histoire et de géographie, Issues 132-137. Port-au-Prince, 1981. pp. 85-107. 

(31) Les Affiches Américaines du 10 février 1776. Parution no. 6, p. 69.

(32) Les Affiches Américaines du 5 octobre 1779. Parution no.40, p.0.

(33) Les Affiches Américaines du 19 décembre 1780. Parution no.51, p.405

(34) David D. Geggus. "Les esclaves de la plaine du Nord à la veille de la Révolution française, pt. 3" in: Revue de la Société haïtienne d'histoire et de géographie, Issues 142-149. Port-au-Prince, 1984. pp.15-44.

(35) Ellen Tarry. The other Toussaint : a modern biography of Pierre Toussaint, a post-revolutionary Black. Boston, 1981. p.206.
(36) Hannah Farnham Sawyer Lee. Memoir of Pierre Toussaint, born a slave in St. Domingo. Boston, 1854. p.27.
(37) Arthur Jones. Pierre Toussaint : A Biography. New York, 2003. p.97.
(38) Almanach royal d'Hayti pour l'année 1816", P. Roux, Imprimeur du Roi. Cap-Henry, 1816. pp.30, 53. 

(39) Baron Pompée-Valentin de Vastey. Essai sur les causes de la revolution et des guerres civiles d'Hayti, faisant suite aux reflexions politiques sur quelques ouvrages et journaux francais, concernant Hayti avec differentes pieces. Sans-Souci, 1819. p.160.
(40) Les Affiches Américaines du 13 juin 1780. Parution no.24, p.190.  

(41) C. N. Céligny Ardouin. Études sur l'histoire d'Haïti, Volume 1, Paris, 1853. p228.
(42) Les Affiches Américaines du 31 décembre 1766. Parution no.53, p.442.
(43) Les Affiches Américaines du 17 juillet 1767. Parution no.28, p.224
.
(44) Les Affiches Américaines du 7 août 1781. Parution no.32, p.299.
(45) Les Affiches Américaines du 23 juin 1784. Parution no.25, p.399.
(46) Les Affiches Américaine du 23 février 1788. Parution no.8, p.337.

(47) Les Affiches Américaines du 17 décembre 1786. Parution no. 52, p.600
.
(48) FR ANOM COL E 26 ; Lien permanent : ark:/61561/up424dxzw4m
(49) Roglo. Jean François Bérard ; Lien permanent : http://roglo.eu/roglo?lang=en;p=jean+francois;n=berard;
(50-52) Paul-Henri Gaschignard. " Gabriel Jean Baptiste Désiré NICOLAS" in : GHC (Généalogie et Histoire de la Caraïbe). No.238. pp.6374-6375 ; Liens permanents : https://www.ghcaraibe.org/bul/ghc238/p6374.rtf ; https://www.ghcaraibe.org/bul/ghc238/p6375.rtf
(53) France. Extrait des Minutes de la Chancellerie du Commissaire de France à New York. No. 633. in : NYPL (New York Public Library). Freedom certificate of Pierre Toussaint. Lien permanent : https://digitalcollections.nypl.org/items/8a1d4ef8-2bf0-95fe-e040-e00a1806794b
(54) Thomas J. Shelley. "Black and catholic in nineteenth century New York city : the case of Pierre Toussaint" in : Records of the American Catholic Historical Society of Philadelphia. Vol. 102, No. 4 (WINTER, 1991), pp. 1-17. (p.6)
(55) Hannah Farnham Sawyer Lee. Memoir of Pierre Toussaint... Op. Cit. p.5.
(56) Arthur Jones. Pierre Toussaint... Op. Cit. p.6.
(57) Arthur T. Sheehan, Elizabeth Odell Sheehan. Pierre Toussaint : a citizen of old New York. 1955. p.125.
(58) Eric Verkimpe. Geneanet.org. ; Lien permanent : https://gw.geneanet.org/verkimpe?lang=en&p=elizabeth&n=audige
(59) Eric Verkimpe. Geneanet.org. ;  Lien permanent : https://gw.geneanet.org/verkimpe?lang=en&p=marie+louise+gabrielle&n=magnan
(60) Arthur Jones. Pierre Toussaint... Op. Cit. pp.315-316.
(61) Arthur T. Sheehan, Elizabeth Odell Sheehan. Op. Cit. pp.9-10.
(62) Thomas J. Shelley. Op. Cit.
(63) Hannah Farnham Sawyer Lee. Op. Cit.
(64) Bishop Norbert Dorsey, CP. Pierre Toussaint of New York : Slave and Freedman. New York, 2014. p.13.
(65) David H. Brown. Santeria Enthroned: Art, Ritual, and Innovation in an Afro-Cuban Religion. Chicago, 2003. pp. 64-71, 317. 




Comment citer cet article:
Rodney Salnave. "Boukman n'était pas jamaïcain". 22 sept. 2016. Modifié le 28 juillet 2019. [en ligne] UR
L: http://bwakayiman.blogspot.ca/2016/09/boukman-netait-pas-jamaicain.html ; Consulté le [entrez la date]

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